En Noir

Nov. 2nd, 2018 03:52 pm
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Fluri Fortnight – Formal Wear

Titre : En Noir

Disclaimer : TOV ne m'appartient pas

Note : Texte court pour le Fortnight. Mes excuses pour ma façon de traiter ce thème mais ma première idée ne me plaisait pas et j'ai pris la seconde…


Le choix avait été fait pour ce moment : une tenue intégralement noire qui collait le mieux avec ses goûts et aux convenances. Cela faisait un moment que ce costume trainait au fond d'un placard et cette occasion était la bonne pour le sortir de là. Une chemise noire et une cravate sombre qu'il n'avait jamais portée avaient été choisies pour compléter l'ensemble, donnant un ensemble chic et sobre à la fois qui faisait qu'il ne détonnait pas par rapport au reste des invités. Ses cheveux auraient pu être noués en catogan mais cela n'aurait en rien collé avec ce qu'il était…

Peu importe tout ce qui avait pu être dit, Yuri avait toujours eu une certaine classe quand il faisait l'effort de porter des tenues habillées, cela même s'il avait toujours haï cela. Après tout, il avait toujours été un grand adepte des chemises mal fermées, des jeans slim déchirés aux genoux et de t-shirts divers et variés. Il avait aussi une vieille veste en cuir qu'il gardait précieusement et qu'il ne mettait que les week-ends pour sortir mais celle-ci avait souffert dernièrement, au point qu'elle n'était plus portable.

Pour Flynn, c'était étrange de ne pas le voir porter une tenue décontractée mais pour ce genre d'évènement, il était mieux de respecter les convenances… même si la pilule restait dure à avaler.

La main de Judith sur son épaule suffit à le sortir de ses pensées, le ramenant à cette réalité qu'était cette mise en bière et dont il aurait aimé s'évader plus longtemps, refusant encore d'admettre que devant ses yeux se trouvait le corps de son meilleur ami, décédé dans un accident de la route après avoir été percuté par un chauffard ivre, placé dans un cercueil ouvert afin que la famille puisse se recueillir une dernière fois avant qu'il ne soit scellé pour la cérémonie.

Pourquoi ne l'avait-il pas dissuadé de sortir ce soir-là ? Cette question tournait en boucle dans son crâne depuis qu'il avait été prévenu de l'accident puis que le décès fut prononcé quelques heures plus tard.

Si Judith et Sodia ne s'étaient pas proposées pour l'aider, jamais il n'aurait eu la force d'organiser des funérailles et de contacter tous leurs amis, Yuri n'ayant plus de famille depuis très longtemps. Pour cette raison, elles étaient restées à ses côtés et elles ne comptaient pas l'abandonner de si tôt.

En entendant des bruits venant d'une pièce voisine, Flynn su que cet instant de recueillement allait toucher à sa fin et il prit sur lui pour y mettre un terme et sortir du funérarium… avant de finir par craquer dans la voiture de Judith, les larmes de douleur coulant sur ses joues en pensant à l'injustice qu'était la mort de son meilleur ami…


NB : De mémoire, je crois que je n'avais jamais osé tuer Yuri… Maintenant c'est fait.

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 Fluri Fortnight – Octobre 31/Novembre 1er : Halloween

Note : A l'origine, je devais poster cela l'année dernière pour le Fluristelle Month. Or, je n'ai pas pu le terminer faute de temps et d'idées donc c'est resté dans mes dossiers jusqu'à ce que je le ressorte pour le réécrire un peu afin de le caser pour le Fluri Forthnight de cette année. Donc mes excuses pour cette longue attente…


 

Quelques secondes après que Yuri ait perdu connaissance, Flynn avait cru que son monde s'était à nouveau effondré, cela jusqu'à ce qu'il comprenne que son aimé était toujours vivant et qu'il avait besoin de son aide. Le ramener au manoir Blackwood était donc urgent car c'était le seul endroit où des fantômes errants n'oseraient jamais pénétrer… et si jamais ils essayaient, ils n'allaient pas tarder à goûter à un sacré comité d'accueil.

Le souci était qu'ils étaient la nuit d'Halloween, soit une des plus chargées pour un Faucheur comme lui à cause de ces fameux esprits qui étaient plus actifs que d'ordinaire tant que le soleil n'était pas visible et aussi à cause de ceux qui manquaient de prudence durant cette fête, causant leur propre mort ou celles de personnes qui auraient dû pouvoir vivre encore de belles et longues années. Avec Sodia qui était elle aussi dans un état inquiétant, ça signifiait qu'il se devait de les tenir éloignés loin de l'autre afin d'éviter toute mauvaise surprise le moment où il sera contraint d'aller accomplir sa macabre besogne… ce qui risquait de ne pas tarder vu le sifflement qu'il commençait à percevoir et qu'il n'avait pas intérêt à ignorer trop longtemps s'il ne souhaitait pas en payer le prix.

—Retrouvez-moi tous au manoir avec Sodia, ordonna le Faucheur en serrant Yuri contre lui. Patty, tu garderas un œil sur elle à tour de rôle avec Judith et vous vous assurerez qu'elle ne quittera pas sa chambre sans mon accord.

—Compris nanoja, dit l'adolescente avec gravité, celle-ci comprenant très bien pourquoi leur camarade devait être isolée.

—Je prendrai le premier tour de garde, ajouta Judith tandis que Karol l'aidait à placer Sodia sur son dos.

—Merci.

Après cela, Flynn avait usé de sa magie pour le ramener lui et Yuri au manoir, plaçant vite le jeune homme entre les mains de Rita pour qu'elle use de ses capacités afin de neutraliser le poison, ce qu'elle fit avec brio – c'était loin d'être la première fois qu'elle soignait quelqu'un ayant été victime d'un fantôme d'une victime d'empoisonnement donc elle savait très bien ce qu'elle faisait, étant le seul type d'esprit capable de neutraliser les effets de ce poison qui agissait par simple contact physique. Elle était ensuite vite allée s'occuper de Sodia, le laissant seul avec celui qui risquait fort d'être leur invité pour un bon moment.

Le manoir Blackwood comptait quatre chambres au premier étage et au deuxième, des chambres de bonnes se trouvant sous les toits. Si le Faucheur s'était installé dans celle de feu Robert Blackwood, la chambre d'amis était à présent celle d'Estellise et de Rita tandis que les chambres de bonnes étaient normalement occupées par les autres fantômes – souvent, Patty préférait élire domicile dans l'abri de jardin pour permettre à Sodia et à Judith d'avoir plus d'espace. Une des chambres du premier étage était un bureau et la dernière, qu'il s'était toujours refusé à toucher, était celle de Lilith.

En toute logique, Flynn avait installé Yuri dans cette pièce, la seule de la demeure qu'il avait laissée dans son état d'origine et où, sauf certaines exceptions comme le ménage, les fantômes n'avaient pas le droit d'aller. Les tapisseries d'un rouge profond avaient un peu vieillies, tout comme les rideaux qui s'étaient décolorés avec la lumière du soleil, mais la coiffeuse était toujours présente tout comme cette armoire en bois sombre, sa commode assortie et le grand lit qui était d'une étonnante simplicité comparé au reste du mobilier qui était plus ouvragé. Le contenu de l'armoire et de la commode était toujours le même depuis cette nuit fatidique, faisant qu'il allait certainement devoir envoyer Raven et Karol chez le jeune homme pour qu'ils récupèrent au plus vite ses affaires…

Durant cette nuit, il dut s'absenter à plusieurs reprises, le contraignant à laisser Yuri sous la surveillance de Repede et d'Estellise avec pour instruction de le prévenir dès qu'il se réveillerait ou que son état changeait – Rita n'avait rien pu faire contre sa fièvre et avait besoin de plus de temps pour essayer de déterminer ce qu'il lui arrivait au juste. Il avait envisagé d'aller demander à d'autres faucheurs ce qu'il se passait exactement mais suite aux évènements de cette nuit d'Halloween, il était à présent extrêmement suspicieux concernant ses confrères et ne leur faisait plus confiance car pour contrôler une telle quantité de fantômes à la fois, il n'y avait qu'un émissaire de la Mort pour y parvenir. Il n'en était pas certain mais il pensait de plus en plus que Lilith avait bel et bien été tuée par un faucheur, ce qui expliquerait qu'il n'ait jamais pu trouver son âme sur place. Seulement, pourquoi la réincarnation ? C'était insensé…

—Des nouvelles ? demanda-t-il à l'érudite une fois de retour vers quatre heures du matin.

—Quoiqu'il lui arrive, je peux certifier que ce n'est pas contagieux, répondit-elle, ce qui sous-entendait certainement que Karol ou Raven avaient dû être mis à contribution contre leur gré à un moment donné. En revanche, l'anneau est bizarre…

A peine a-t-elle dit cela qu'elle désigna la main gauche de Yuri… ou l'on pouvait nettement voir l'alliance briller par intermittence. C'était la première fois qu'il voyait ça…

—Estelle a parcouru les bouquins que le Faucheur qui t'as servit de témoin de mariage t'avait offert, poursuivit Rita. Apparemment, il se peut qu'il soit en train de chercher à rejeter l'anneau mais le hic, c'est que s'il le fait maintenant…

—Sa vie sera à nouveau en danger, compléta Flynn en voyant la mine grave de l'adolescente. Il faudrait savoir exactement ce qu'il se passe dans son esprit.

Et chance, il avait une bonne idée de comment faire cela…

Durant son temps libre, Flynn avait passé de longues heures à étudier de vieux écrits concernant les Faucheurs et, surtout, ceux qui avaient été mariés à des mortels. Suite à ce qu'il avait pu lire de l'expérience de l'un d'entre eux, il avait décidé qu'il était temps de tenter quelque chose qu'il n'avait jamais voulu essayer avant aujourd'hui : entrer dans les songes de Yuri grâce au lien entre les anneaux. L'idée le dérangeait un peu car les rêves étaient quelque chose d'assez… intime mais s'il voulait savoir comment se portait réellement son ami, c'était la solution la plus efficace. Qui plus est, il avait peut-être une chance de trouver un indice sur l'identité de l'assassin de sa compagne.

Après avoir congédié Rita, il s'allongea aux côtés de son ami, joignit leurs mains gauches puis ferma les yeux, se laissant emporter par le sommeil. En ouvrant les yeux, il était toujours dans le manoir… mais vu l'état des lieux, durant le XIXème siècle.

La chambre de Lilith était en désordre, ce qui était son état normal quand la maîtresse des lieux était vivante – le Faucheur avait eu pas mal de disputes avec elle à ce sujet avant de comprendre que cela ne servait à rien et qu'il valait mieux qu'il range lui-même s'il voulait que ce soit fait un jour. Le lit était jonché de vêtements qui avaient vraisemblablement été sortis de l'armoire et jetés à cet endroit vu que certains avaient dû glisser par terre. Fouillant parmi ses placards, Lilith était manifestement en train d'essayer de déterminer ce qu'elle allait mettre ce jour et n'était actuellement vêtue que d'une chemise légère blanche et d'un pantalon de lingerie qui était généralement porté sous une robe. Ses cheveux de jais étaient plus ou moins maintenus en un chignon approximatif mais une mèche venait régulièrement lui chatouiller le nez, faisant qu'elle soufflait à chaque fois sur celle-ci pour la chasser – il mourrait d'envie d'aller lui placer cette mèche derrière son oreille, cela afin d'en profiter pour caresser son visage et voir ses beaux yeux se tourner vers lui.

Soudain, des coups violents retentirent à la porte de sa chambre… bloquée par une chaise afin d'empêcher quiconque d'entrer.

—Elisabeth ! tonna sa tante en tentant, sans succès, de pénétrer dans la pièce. Ouvrez cette porte !

—Je suis occupée ! répliqua la jeune femme en jetant un chapeau dans le coin où Repede dormait.

La scène continua de se dérouler sous les yeux de Flynn, reconnaissant un épisode que lui avait conté sa compagne lors de leurs nombreuses discussions. Lady Greed tenait à ce que sa nièce adopte les dernière modes, notamment celles de la période victorienne où les robes des femmes étaient assez chargées. Seulement, Lilith détestait porter des jupons et, surtout, des corsets, faisant qu'elle avait sciemment détruits chacun d'eux, s'attirant les foudres de sa parente qui finit par abandonner à force de voir l'obstination de la jeune femme à saccager tous les vêtements qu'elle lui apportait.

En voyant ce moment du passé recommencer du début, le Faucheur eut des soupçons puis, afin de comprendre ce qui était en train de se passer, il changea de pièce afin de vérifier son hypothèse, se rendant dans le petit salon qu'il connaissait si bien. Là, un autre évènement du passé s'y déroulait : une après-midi calme entre Estellise et sa compagne. Celle-ci était en train de jouer Lettre à Elise pour son amie qui semblait en savourer chaque note. Il vit, sur la table basse, deux tasses de thé ainsi qu'un ruban vert anis dont il se rappelait assez bien, faisant que vers la fin du morceau, il se décala… et laissa la place à sa version de lui-même de l'époque, habillé en peintre et subjugué par la musique que Lilith jouait sur son piano.

Il en était certain à présent : à tous les coups, Yuri rêvait de toute sa vie antérieure, revoyant tout ce qu'avait vécu Elisabeth Blackwood. Par contre, cela ne lui disait pas où il pouvait bien être…

Sans perdre de temps, il visita toutes les pièces du manoir, faisant face à bon nombre de souvenirs qu'il avait ou non partagé avec sa compagne – il eut le rouge aux joues en entrant dans sa chambre et en tombant pile sur ce qui devait correspondre à leur nuit de noces vu qu'il n'y avait aucun signe des vêtements de la jeune femme dans la pièce. Une fois le tour de la demeure faite, il en conclut que son ami ne s'y trouvait point et continua donc dans le jardin.

Derrière le manoir, il y avait un pommier que feu Robert Blackwood avait planté quelques années avant qu'il ait recueillit sa petite fille et celui-ci avait pris de l'ampleur au fil des ans, faisant que, une fois, le Faucheur s'était endormi dessous suite à une journée qui l'avait pas mal épuisé au niveau émotionnel. Seulement, Lilith avait aussi choisi ce jour précis pour grimper dans cet arbre afin d'en cueillir les fruits pour préparer des desserts et elle avait tellement agité les branches qu'une des pommes était tombée sur sa tête, le réveillant brutalement et déclenchant une bonne série de piques verbales entre eux qui s'acheva quand sa compagne tomba de l'arbre et qu'il servit à amortir sa chute.

Alors qu'il repensait à cela, Flynn reçut quelque chose derrière la tête, lui arrachant un « Aïe ! » de douleur. Il baissa les yeux et vit que c'était une pomme bien rouge qui était la coupable. Cependant, il n'était pas sous l'arbre donc comment était-ce possible ?

Un autre fruit se cogna contre son crâne et il se tourna pour en esquiver un troisième de justesse. En levant les yeux vers la cabane servant d'abri de jardin, il réalisa que, assit sur le toit avec une pomme dans la main, il y avait Yuri qui le fixait avec méfiance, visiblement prêt à lui envoyer un autre projectile.

—Tu comptais me dire un jour la vérité j'espère ? lui demanda son ami qui semblait de mauvaise humeur. Parce que j'avoue que là, j'ai bien envie de t'en coller une !

Il devait admettre que celle-là, il l'avait méritée… et vu la situation, il n'avait plus aucun intérêt à lui mentir, même s'il se doutait que, vu leurs caractères respectifs, il y avait un risque non nul qu'ils en viennent aux mains – par principe, il détestait frapper quelqu'un qui était sans défense mais il avait déjà pu constater que Lilith avait un très bon crochet du gauche, un détail qui n'avait pas dû changer…

—J'avais peur que tu te fasses tuer de nouveau, répondit Flynn en se massant l'arrière du crâne. Qui plus est, tu avais ta propre vie donc je ne voulais pas t'imposer quoique ce soit…

—Ah oui ? répliqua Yuri, clairement suspicieux. Alors pourquoi tu es resté dans les parages ? Pour m'espionner ?

—Dois-je te rappeler que l'anneau à ta main n'est pas sans danger ?

A cette remarque, Yuri grogna et jeta un œil au bijou en question. Il le fixa quelques secondes avant de jeter une pomme sur le Faucheur qui, cette fois-ci, la rattrapa avant qu'elle n'atteigne sa cible.

—Je suis désolé pour tout cela, dit Flynn en se dirigeant vers l'échelle contre la cabane. Je m'inquiétais pour toi et je refusais de te perdre à nouveau…

—A raison faut croire, grommela son ami avant de froncer les sourcils. Soit je n'avais pas de chance, soit quelqu'un ne devait pas vouloir que je retrouve les souvenirs d'une vie antérieure…

D'un pas vif, il monta les barreaux de l'échelle puis une fois en haut, il s'assit à côté de son ami, son regard azur admirant la vue qui leur était offerte sur les lilas aux tons blancs et violacées.

—Pendant des années, j'ai mené mon enquête mais jamais je n'avais envisagé que le coupable de ton meurtre pourrait être autre chose qu'un humain, admit le Faucheur en grinçant des dents. Si j'avais seulement pris cela en compte…

—Ca aurait été pire Flynn.

Les yeux anthracite de Yuri étaient à présent plantés dans les siens et le fixait avec intensité.

—… Il m'aurait tué pour me faire taire, conclut le Faucheur en se remémorant ce fameux soir où son bonheur avait volé en éclats. S'il est ce que je pense qu'il est, il n'aurait pas hésité. Mais s'il t'a tué, comment a-t-il fait pour cacher cela ? Un faucheur ne doit pas tuer d'humain…

—Si je me souvenais de ce jour-là, ce serait possible mais va comprendre pourquoi, c'est le seul souvenir auquel je n'ai pas accès, lui déclara son ami, contrarié. Si on excepte bien sûr cette scène que j'ai vue sans cesse…

Ce rêve étrange qu'il faisait depuis pas mal de temps… Sauf que, en se souvenant des descriptions faites, une incohérence le frappa : si Lilith était morte à ce moment-là, comment Yuri pourrait voir son cadavre vu qu'il était sa réincarnation ? Ce n'était pas logique, tout comme le fait que, dans ce songe, le piano s'obstinait à jouer le troisième mouvement de la sonate Clair de lune, celui qui avait toujours posé des difficultés à sa compagne mais dont elle jouait admirablement bien quand elle était sous le coup d'une émotion forte…

D'ailleurs, de quoi se souvenait-il de ce fameux 31 octobre ? Beaucoup de choses vu qu'à chaque fois qu'Halloween approchait, il se repassait en boucle ce jour fatidique pour essayer de comprendre pourquoi cela s'était terminé ainsi…

—… Et si je te montrais ce dont je me rappelle ? proposa le Faucheur. Cela doit être possible vu où nous sommes à la fois physiquement et psychiquement…

—… Le manoir existe toujours, en conclut Yuri avec un sourire en coin. Tu l'as donc gardé ? Durant toutes ces années ?

—Je n'ai jamais eu le cœur de m'en séparer. J'ai dû y faire quelques modifications et rénovations avec le temps, comme revoir l'installation électrique ou bien planter un nouveau pommier suite à un accident avec l'ancien mais dans sa globalité, ton ancienne maison n'a quasiment pas changée.

Face aux avancées technologiques et aux effets du temps qui passe, Flynn avait fait au mieux pour limiter les gros travaux, se concentrant uniquement sur ceux qui étaient nécessaires comme la plomberie, l'électricité et l'isolation du toit – les murs du manoir étaient suffisamment épais pour garder la fraicheur en été et la chaleur en hiver, ce qui lui avait bien rendu service à l'époque. S'il n'avait pas touché aux portes qui avaient étonnamment bien vieillies, il avait été contraint de faire changer certaines fenêtres à cause des facéties de ses pensionnaires fantomatiques et de faire refaire la cuisine – il n'avait pas besoin de manger pour survivre mais l'arrivée de Sodia qui était un fantôme ressentant la faim l'avait poussé à installer un réfrigérateur et réhabitué à prendre ses repas comme s'il était un humain comme les autres. Le plus simple pour lui avait été de changer les tapisseries qui avaient perdu de leur éclat ou qui se déchiraient, le tout en restant le plus fidèle possible au style d'origine – pour ça, il avait pu se faire aider de Karol puis de Sodia, tous deux étant capables d'interagir avec tous les objets et personnes qu'ils désiraient sans la moindre contrainte et sans qu'il ne doive user de ses pouvoirs. En revanche, concernant le jardin, s'il n'avait pas eu un jour la bonne idée de vouloir planter un second pommier à partir d'un plant venant du premier, il aurait été contraint d'en acheter un vers les années 50 – suite à une dispute entre Raven et Rita, cette dernière avait accidentellement mis le feu au vieux pommier, ce qui avait valut aux deux concernés de se faire remonter les bretelles en beauté et au Faucheur de devoir revoir l'ensemble des protections qu'il avait placées sur le manoir afin de les étendre au jardin, rendant ainsi toute la propriété insensible aux pouvoirs des fantômes.

Avec prudence, Flynn tendit sa main vers Yuri qui fixa longuement cette dernière avant de lever les yeux vers lui.

—Est-ce que tu es prêt à accepter mon aide ? demanda-t-il avec appréhension. Je te promets que tu pourras rentrer chez toi si tu le désires et qu-

—Je suis chez moi, le coupa le jeune homme. J'ai autant envie que toi de connaitre le fin mot de cette histoire, même si je crève d'envie de te coller mon poing là où je pense.

Sans hésitation, Yuri lui prit la main, serrant celle-ci entre ses doigts avec fermeté… avant de le tirer vers lui et d'attraper le col de sa chemise de son autre main pour ensuite le plaquer contre le toit avec force.

—Et une fois qu'on sera sortis de là, il faudra qu'on parle toi et moi, lui rappela le jeune homme en se plaçant au dessus de lui. Donc n'espère pas que je te lâcherai si facilement…

—C'est bien compris, répondit Flynn, captivé par cet éclat fougueux dans le regard de son aimé qui lui avait tant manqué.

Après quelques secondes de flottement où il voyait que le jeune homme semblait en grande réflexion, ce dernier finit par se baisser vers lui avant de marquer un bref instant d'hésitation qui se dissipa à l'instant où il unit leurs lèvres durant un court instant. Suite à cela, tous deux se relevèrent et quittèrent le toit de l'abri de jardin, retournant à l'intérieur du manoir en gardant bien leurs mains jointes.

Très concentré, le Faucheur gardait son esprit focalisé sur le jour du 31 octobre 1870, se remémorant chaque détail de cette journée à partir de son commencement, le tout en conduisant son aimé vers le lieu correspondant.

—C'est peut-être un peu tôt pour les galipettes, fit Yuri quand ils pénétrèrent dans la chambre à coucher que Flynn avait occupé depuis son emménagement au manoir.

—J'ai pourtant la certitude que cela ne t'arrêtait pas, répliqua-t-il avec un sourire amusé face à l'air faussement innocent que lui montrait son aimé. Et puis tu avais passé la nuit dans ma chambre, ce qui n'était pas désagréable à voir.

A peine eut-il prononcé ses mots que la scène dont il se rappelait se dessina dans la pièce aux tapisseries bleu pastel : allongée sous les draps bleu roi, Lilith était endormie, ses cheveux de jais éparpillées autour de sa tête tandis que le Faucheur était allongé à ses côtés, la regardant dormir avec un sourire rêveur sur les lèvres.

—Jamais je ne me suis lassé de ce spectacle, avoua Flynn avec un certain émerveillement. Même maintenant, tu es toujours aussi captivant quand tu es endormi…

—… Rappelle-moi de te coller une baffe pour chaque fois où tu es entré dans mon studio à mon insu pour me mater dans mon sommeil, menaça Yuri en lui jetant un regard noir. Et tu as intérêt à ne pas mentir sur le nombre…

Le Faucheur eut un sourire amusé en entendant cela, surtout quand il vit que le jeune homme à ses côtés avait les joues plus roses que d'ordinaire.

Malheureusement, ce jour-là, il n'avait pas pu assister au réveil de Lilith, son travail d'émissaire de la mort s'étant rappelé à lui à cause d'un accident domestique qui s'était avéré mortel – il avait dû faire preuve de psychologie face à ces fantômes qui étaient très paniqués afin de les calmeret de les aider à accepter leur sort, même si ce n'était pas facile. Du coup, ils avaient changé de pièce, se rendant dans la salle à manger où il avait retrouvé sa compagne en train de prendre son petit-déjeuner avec Repede à ses côtés – ce n'était pas la pièce où elle passait le plus de temps, surtout parce qu'ils recevaient rarement pour dîner à l'exception d'Estellise qui venait au moins une fois par semaine et aussi car sa compagne préférait manger à l'extérieur quand la météo et les températures le permettait.

Rien de particulier ne s'était passé à ce moment précis : il avait rejoint Lilith pour le petit-déjeuner, échangé quelques banalités tandis qu'elle finissait de se réveiller puis quand ils eurent tous deux fini, il avait commencé à débarrasser la table au moment où il avait été appelé à de nouveau remplir ses fonctions, cette fois-ci à cause du choléra qui avait fait de nouvelles victimes dans un hôpital à quelques kilomètres du manoir.

Il lui avait presque fallut une heure pour terminer sa macabre besogne, cela à cause de décès supplémentaires qui n'étaient pas tous liés à cette maladie – il avait été contraint de prendre quelques minutes pour se calmer après avoir envoyé dans l'au-delà une femme qui avait succombé aux coups de son époux qui risquait fort d'échapper à la justice vu son statut social. A son retour au manoir, sa compagne s'était absentée, probablement pour aller au marché, et il en avait profité pour aller s'installer dans le petit salon pour y lire le premier livre qui lui était tombé sous la main.

Environ une demi-heure plus tard, il avait entendu Lilith revenir et, à son pas rapide sur le plancher, il n'avait pas mis longtemps à comprendre qu'elle aussi n'était pas de très bonne humeur.

—Quelle bande de sales commères ! s'était-elle exclamée en rentrant dans la pièce, jetant son chapeau à ses pieds avec un certain agacement. Je ne peux pas faire un pas en ville sans que cela ne murmure sur nous dans mon dos. Elles ne peuvent pas trouver un autre sujet de discussion ?

—Le jour où un autre couple marié restera plusieurs années sans enfants, cela arrivera certainement, avait souligné Flynn avec une certaine tristesse, sachant très bien que beaucoup reprochaient à sa compagne d'être la raison pour laquelle ils n'avaient aucun enfant alors qu'en réalité, le problème venait de lui. Seulement, en jasant comme ils aiment tant le faire, ils vont leur faire plus de mal qu'autre chose…

En l'entendant dire cela, Lilith s'était instantanément calmée, une lueur d'inquiétude s'étant allumée dans son regard. Puis, brusquement, elle lui avait arraché son livre des mains et s'était assise à ses côtés, attirant toute son attention vers elle.

—Ne me dis pas que tu recommences à broyer du noir avec ça ? lui avait-elle dit, suspicieuse. Nous en avons déjà parlé et ce n'est pas comme si je m'étais engagée avec toi pour être mère de famille !

—Ca ne m'empêchera pas de m'en vouloir de ne pas être capable de fonder une famille avec toi, avait-il répliqué en baissant les yeux. Je m'en veux de te laisser seule ici avec Repede…

—Sauf que vu ce que tu es, c'est trop risqué de prendre du personnel et puis… je t'avoue que je pense de plus en plus à l'adoption…

A ces mots, il avait brusquement relevé la tête vers elle, lui permettant de découvrir le léger sourire qu'elle avait aux lèvres et qui trahissait le fait qu'elle craignait qu'il réagisse mal à cet aveu… probablement à cause du fait qu'il allait certainement être celui qui enverra son épouse et ses enfants dans l'au-delà.

—Le manoir serait plus animé, avait-il dit avec un sourire, rassurant sa compagne. Cet endroit est un peu trop calme par moments.

—Entièrement d'accord.

C'était probablement un des plus grands regrets de Flynn : ne pas avoir eu d'enfants avec Lilith, même si ceux-ci n'étaient pas de leur sang à l'un ou à l'autre. N'ayant jamais eu de relation affective depuis qu'il était devenu un Faucheur, il avait découvert avec sa compagne que cela avait probablement eu pour conséquence de le rendre stérile – à partir de leur nuit de noces, leur vie sexuelle était active, cela même s'ils faisaient chambre à part une nuit sur deux, et il pouvait attester que tous deux savaient parfaitement comment s'y prendre pour concevoir un enfant.

Après un an sans résultat, tous deux s'étaient faits à l'idée qu'il leur serait compliqué d'être parents…

—Dans un sens, vu ce qu'il s'est passé ensuite, c'était peut-être mieux qu'il n'y ait eu personne d'autre au manoir, finit par dire Yuri avant de déglutir. J'imagine que si Repede est un fantôme…

—Il a été tué le même soir que toi, oui, confirma Flynn qui se souvenait encore très bien que l'animal avait été égorgé et que son esprit errait près du corps de sa maîtresse. J'ai voulu l'envoyer dans l'au-delà mais dès que j'ai sorti ma faux, il m'a vite fait comprendre qu'il n'était pas d'accord.

Depuis cette nuit fatidique, le chien et lui recherchaient le coupable derrière ce crime mais malheureusement, ils n'avaient pas eu beaucoup de résultats et le Faucheur savait à présent que c'était normal vu qu'en réalité, c'était un de ses semblables qui était derrière tout cela… mais son identité ainsi que son mobile lui échappait. Qui plus est, cela n'expliquait toujours pas pourquoi l'âme de sa compagne s'était réincarnée car il ne voyait aucune raison de tuer une personne pour la forcer à renaître quelques années ou siècles plus tard – c'était une capacité que possédait les émissaires de la Mort mais elle n'était que rarement utilisée car cela signifiait que le Faucheur qui en faisait usage entrait dans une période de sommeil le temps de récupérer toute l'énergie dont il avait dû faire usage, ce qui le rendait vulnérable et posait souci au niveau des fantômes qui n'avaient pas d'autre choix que d'errer dans le monde des vivants – et où il avait bien pu se cacher durant autant de temps après avoir fait cela.

Ils continuèrent ensuite de faire le tour de ses souvenirs, passant par la moitié des pièces du manoir mais sans rien voir de très intéressant – la majorité du temps, chacun était concentré sur ce qu'il faisait comme lire le courrier ou faire la cuisine –, cela jusqu'à avoir atteint la dernière scène qui se déroulait à la nuit tombée…

D'après le nombre de coups de l'horloge, il était dix heures du soir quand ses sens de Faucheur avaient été alertés par un grand nombre de décès, encore une fois dus à l'épidémie de choléra. A ce moment-là, il était en train d'écouter sa compagne qui jouait un des Nocturnes de Chopin – s'il ne se trompait pas, c'était l'opus 9, numéro 2 – qui s'était interrompu en voyant qu'il s'était levé en grimaçant.

—J'ai peur de rentrer tard encore une fois, avait-il dit en passant sa main dans ses cheveux. C'est sérieux donc…

—Je ne t'attends pas pour aller me coucher, je sais, avait-elle complété avant de lâcher un soupir. J'ai l'habitude… Et tu m'as assez rabâché ces derniers jours de ne laisser rentrer personne ici un 31 octobre. Tout ira bien.

Malheureusement, Lilith s'était trompée vu qu'après son départ, elle avait été assassinée dans cette pièce, vêtue de cette même robe blanche style empire qu'elle avait mise car elle était plus légère que ce qu'elle avait porté le matin pour aller au marché – il l'avait entendue râler sur le fait qu'il faisait plus chaud qu'elle ne l'avait prévu pour un mois d'octobre. Malgré les protections qu'ils avaient mises sur le manoir pour que sa compagne ne reçoive aucune visite de fantôme errant, elle n'avait pas pu échapper à ce sort funeste, rien ni personne n'étant en mesure de la sauver à ce moment précis.

—A part m'avoir comblé quelques trous sur ce jour précis, je n'ai rien de nouveau qui me vient en tête, signala Yuri une fois qu'ils eurent vu tout ce dont il se souvenait. Ca ne m'explique toujours pas ce fichu rêve qui tourne en boucle avec le piano qui joue du Beethoven…

—Tu peux me montrer ce rêve ? lui demanda Flynn en se souvenant qu'il avait cru relever des incohérences, cette mélodie étant l'une d'elles. Il y a quelque chose que j'aimerai vérifier…

—Il y truc qui ne colle pas avec le reste.

Il avait réalisé lui aussi, probablement grâce à la mémoire de Lilith et à ce qu'il lui avait montré.

Son ami lui tenait toujours la main puis, alors qu'il se concentrait, rapidement, les lieux se modifièrent et, à peine la pièce fut nette à leurs yeux que le troisième mouvement de la sonate Clair de lune résonna avec force, couvrant les autres sons qui auraient pu être présents.

Son regard azur nota chaque détail, allant du courant d'air à la fenêtre à la tasse en porcelaine brisée au sol, le tout en n'oubliant pas le foulard en soie claire qui était déchiré ainsi que les quelques autres signes prouvant qu'il y avait eu lutte dans cette pièce – de mémoire, il confirmait que la lampe qui se trouvait ici à l'origine avait bien été cassée cette fameuse nuit et les meubles avaient bien été bougés de cette façon mais pour ce qui était de la tasse brisée, cela ne collait pas car il avait retiré ce plateau de la table bien avant son départ et le service était intact.

Puis en apercevant le corps sans vie de sa compagne, le Faucheur déglutit, son cœur se serra dans sa poitrine et ses souvenirs de cette horrible découverte lui revinrent en mémoire : son effroi en la découvrant ainsi au sol, sa peau aussi froide qu'un bloc de glace... Ses yeux bleus n'arrivaient pas à se détacher de ce visage, plus pâle que d'ordinaire, aux yeux gris éteints et aux lèvres bleues entrouvertes dans un cri muet…

—Flynn !

La voix de Yuri le ramena à lui, lui rappelant que ce qu'il voyait n'était pas réel. Il détacha son regard du corps de Lilith et se concentra sur l'élément le plus incohérent qui soit : le piano.

En recoupant ses souvenirs de ce jour fatidique avec ce qu'il voyait, il nota que la partition qui était sur l'instrument n'était pas celle du troisième mais du premier mouvement – c'était d'ailleurs étrange en soit car ce jour-là, à sa connaissance, elle n'avait pas du tout joué de Beethoven mais plus du Chopin ou du Mozart. De plus, les feuillets qu'il voyait n'étaient plus très lisible… à cause d'une trace de main ensanglanté sur l'une des pages, ce qui ne correspondait pas à la réalité car les feuillets étaient en excellent état et tous rangés avec soin, signe que sa compagne avait dû en réalité finir le morceau qu'elle jouait avant qu'il ne la quitte.

—Je comprends mieux pourquoi je ne supporte pas les écharpes, ironisa Yuri qui examinait le corps de Lilith. Tu as trouvé quelque chose ?

—Ce n'est pas fidèle à ce que j'ai constaté en découvrant… la scène de crime, révéla difficilement Flynn en prenant garde à ne pas fixer le cadavre de sa compagne. Il n'y avait aucune partition sur le piano et aucune n'était tachée de sang.

—… Tu m'as bien dit que Repede est mort aussi ce jour-là ?

—Oui, sa gorge avait été tranch-

Le Faucheur ne poursuivit pas sa phrase, ayant soudain prit conscience d'une grave incohérence qui n'avait absolument aucun sens si le meurtrier n'était pas humain : quel besoin avait-il de tuer Repede et pourquoi lui et sa maîtresse étaient morts de deux façons différentes ? Qui plus est, dans quel ordre avaient-ils été tués ? La logique aurait voulu que ce soit le chien en premier pour éviter qu'il ne donne l'alerte mais si l'assassin était un faucheur, il pouvait facilement prendre Lilith par surprise mais pourquoi choisir la strangulation alors qu'il avait de quoi égorger quelqu'un ?

Soudain, un mal de crâne commença à vriller la tête de Flynn, sonnant une sorte de glas à l'intérieur de sa tête. Un coup d'œil à sa main droite qui se couvrait progressivement de taches noires lui confirma ce qu'il pensait : quelqu'un était mort et comme il tardait à réagir à cause du fait qu'il était dans l'esprit de Yuri, il en payait le prix. S'il restait ici trop longtemps, il allait se faire éjecter de force et attirer d'autres faucheurs, ce qu'il voulait éviter vu les circonstances.

—Il faut que je parte, déclara Flynn en grimaçant tout en désignant sa main. Je ne peux pas rester ici plus longtemps et… ce serait bien qu'à mon retour, tu sois réveillé. Nous avons pas mal de choses à régler je pense.

—Je pense aussi, confirma Yuri en lui serrant plus fermement la main avant de sourire en coin. On a combien à rattraper au juste. Plus de cent cinquante ans non ?

—C'est à peu près ça.

-§-

A peine Flynn avait quitté ses songes que Yuri s'était réveillé avec la tête lourde. Il avait tenté de se lever mais le Faucheur ainsi qu'une adolescente qu'il n'avait jamais vue – il avait cru comprendre qu'elle s'appelait Rita – le lui ont vivement déconseillé… ce qu'il comprit vite en constatant qu'il avait de la fièvre ainsi que des vertiges. Il était donc obligé de se reposer et de rester alité tant que son état ne s'améliorait pas.

Il essaya donc de dormir un peu mais ce n'était pas facile, surtout avec ce rêve qui persistait à tourner en boucle dès qu'il fermait les yeux. Qui plus est, maintenant qu'il se souvenait de sa vie en tant qu'Elisabeth Blackwood, il trouvait ces images très désagréables à voir au point d'en avoir des nausées.

A son réveil, le soleil commençait à filtrer à travers les vieux rideaux. Il se tourna du côté opposé pour voir Flynn, endormit sur une chaise et qui, vu ce qu'il avait dans les cheveux, avait dû passer par une soirée d'Halloween – il se demandait si le Faucheur avait réalisé qu'il avait un morceau de fausse toile d'araignée violette collée dans sa tignasse ainsi que de la mousse à raser et un truc vert qui semblait bien gluant. En baissant les yeux, il s'aperçut que quelqu'un d'autre était là et, qu'en le voyant ou l'entendant bouger sur le lit, cela l'avait réveillé.

—Salut Repede, murmura-t-il à son vieil ami à quatre pattes en tendant la main vers lui. Ca fait un bail.

En guise de réponse, le chien se rapprocha pour lui renifler la main… avant de glisser sa tête dessous, permettant à Yuri de lui gratter les oreilles. D'ailleurs, comment pouvait-il le toucher alors que Repede était un fantôme ?

—Il peut interagir avec tous les objets et personnes qu'il désire, répondit la voix de Flynn qui était en train d'ouvrir les yeux. Qui plus est, avec l'alliance, tant que tu la portes, tu restes lié à moi et tu peux donc toucher tous les fantômes si tu le désires dans une certaine mesure.

—Qui est… ? fit-il, son regard concentré sur son vieil ami à quatre pattes qui était visiblement enchanté de le retrouver, même s'il avait beaucoup changé.

—Tu n'es pas un faucheur donc tu dois rester prudent quand tu en touches un, surtout si c'est celui d'une victime d'empoisonnement. Ceux-là peuvent tuer un humain au moindre contact physique.

Il comprenait mieux pourquoi Sodia lui avait dit qu'il allait mourir s'il en touchait un autre…

—Ceux des électrocutés sont dangereux pour les personnes cardiaques ou portant un pacemaker mais dans ton cas, tu risques juste de sentir une légère décharge, comme avec de l'électricité statique, poursuivit Flynn. Pour les autres, au sein du manoir, il n'y aura aucun souci. J'ai suffisamment chargé celui-ci en protections pour m'assurer qu'il ne tombe pas en ruine en mon absence…

Vu la manière dont il avait prononcé ces mots, il y avait pas mal de vécu derrière…

—Et excepté Repede, il y a combien de fantômes ici ? demanda Yuri en se mettant en position assise. Un certain nombre j'ai l'impression…

—Tu en connais déjà quelques-uns et, si je ne me trompe pas, ils sont sept, répondit le Faucheur en se massant les tempes. Certains d'entre eux sont passés maîtres dans l'art de me donner des maux de tête…

Par déduction, le jeune homme en conclut aisément que Karol, Patty et Sodia étaient tous trois des fantômes ainsi que cette Rita qu'il avait vue tout à l'heure. Judith, qui lui avait été présentée rapidement la veille, en était un à coup sûr ainsi que ce type – s'il avait bien compris, il s'appelait Raven. Il lui en restait donc un à rencontrer.

—D'ailleurs, j'ai l'impression que tu as dû faire fureur cette nuit, fit-il en désignant la tignasse blonde de son ami qui se passa la main dans les cheveux, grimaçant en sentant ce qui s'y trouvait. Je croyais que la capuche était de rigueur pour ta tenue de travail ?

—J'ai dû passer par une soirée d'Halloween très animée, précisa Flynn en prenant un mouchoir en tissu dans une de ses poches pour essayer de nettoyer les dégâts. Il y avait tellement de monde que j'ai eu du mal à trouver l'âme que je cherchais. J'ai fini par lui mettre la main dessus au niveau du bar où il était devenu un fantôme et où il essayait d'augmenter encore plus son taux d'alcoolémie… ce qui était la cause de sa mort.

—Certains n'ont jamais appris ce qu'était la modération… et de mémoire, je crois que tu détestes gérer ce genre de fantômes.

D'après les souvenirs qu'il avait récupéré de sa vie antérieure, le faucheur n'avait jamais apprécié devoir gérer ceux décédés suite à un coma éthylique, principalement car ceux-ci, une fois devenus esprits, restaient ivres même après leur mort et il était difficile de leur faire comprendre qu'ils avaient passé l'arme à gauche, voire même de les envoyer dans l'au-delà car ces esprits étaient imprévisibles à cause de leur état d'ébriété.

—J'en viens des fois à regretter les épidémies de choléra, soupira Flynn avant de lui sourire. Tu m'as manqué tu sais…

—Et tu me sors ça comme ça ? répliqua Yuri, l'air faussement agacé. En me plaçant au même niveau qu'un virus pourri ?

—D'abord, le choléra n'est pas un virus mais est dû à une bactérie et ensuite, de toutes les âmes que j'ai pu rencontrer dans ma longue vie, jamais je n'en ai vue une aussi belle et éblouissante que la tienne. Jamais.

… Pas de doute, c'était la vérité. Déjà dans sa vie précédente, le Faucheur lui avait déclaré cela avec la même ferveur et à présent, il comprenait à quel point le physique importait peu à ses yeux car il s'en fichait que son partenaire soit un homme ou une femme. Tout ce qui l'intéressait, c'était ce qu'était la personne à l'intérieur, qui elle était réellement.

—Je vois que t'as pas changé, constata le jeune homme avec un certain amusement. Toujours à me balancer ce genre de niaiseries…

—Ce n'est que la pure vérité, déclara l'émissaire de la mort en se rapprochant de lui. Et encore, cela fait un bon moment que je me retiens de te dire à quel point j-

—La ferme.

Pour être certain que Flynn se taise, Yuri l'attrapa par la chemise et le tira brutalement vers lui avant de rapprocher leurs visages puis de plaquer leurs bouches l'une contre l'autre, faisant se frôler leurs nez au passage. Au bout de cinq secondes, il s'écarta de quelques centimètres, constatant que le Faucheur était encore surpris par ce geste… et il en profita pour lui coller son poing en pleine mâchoire, prenant l'autre totalement au dépourvu.

—Ca c'est pour m'avoir encore espionné dans mon sommeil ! s'exclama-t-il, faisant craquer ses doigts alors que son ami se tenait la mâchoire. Maintenant, tu vas me dire combien de fois tu m'as épié qu'on règle cela dès maintenant…

—J'aurais dû deviner… fit Flynn en massant la zone qui avait été frappée. Et ça n'est pas impo-

—Combien ?

—… Une dizaine je dirais…

Vu le regard bleu fuyant et le fait que ses pieds s'étaient légèrement tournés vers la porte de la chambre, Yuri estima que le compte n'y était certainement pas ou avait été largement revu à la baisse, faisant que, par mesure de précaution, il jugea préférable de se préparer à asséner une centaine de baffes au Faucheur avant que celui-ci ne lui fausse compagnie…


NB : Suite y aura-t-il ? Pas dans l'immédiat car ceci était mon dernier texte pour le Fortnight mais ça ne signifie pas que je compte arrêter cette fic. Ca dépendra surtout de mon temps libre.

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 Fluri Fortnight : 29 octobre / 30 octobre : Festival

Disclaimer : Tales of Vesperia ne m'appartient pas

Titre : Rythme estival

Auteur : Kaleiya Hitsumei

Rating : T

Note : Texte écrit à la dernière minute pour cause de blocage (mon cerveau refusait catégoriquement de faire autre chose que la Fête de la Musique… et j'ai fini par céder en voyant que je n'aurais qu'un seul texte si je me bougeais pas les fesses), manque de temps et chat pas très coopératif ces derniers jours (comprenez-le : il s'est mis à faire froid et je dors dans la pièce la plus chaude de la baraque donc…). Il n'a donc pas été corrigé donc j'espère qu'il n'y a pas trop de fautes qui subsistent et que cela vous plaira malgré tout.

Playlist : Beast in Black – Born Again


C'était chaque année lors du jour le plus long de l'année que tout le pays était rythmé par le soleil et la chaleur de bien nombreuses mélodies, celles-ci résonnant dans les rues au moins jusqu'à la tombée de la nuit.

Au début, pour eux, ça ne signifiait pas grand chose excepté le "Festival du bruit" dont se plaignait régulièrement Hanks et auquel ils avaient trouvé drôle de participer à leur façon en jouant des cymbales avec des couvercles de poubelles. Cela leur avait valu un bon sermon mais, sincèrement, ils ne regrettaient rien.

Ensuite, en grandissant, ils avaient commencé à comprendre que ce jour de fête était plus que des basses faisant trembler le sol et tapant contre les murs. Jeunes collégiens, ils avaient arpentés les rues pour voir les différents groupes jouant devant les bars, commerces et parc où des scènes avaient été installées pour l'occasion. Même s'ils n'avaient pas les mêmes avis sur les différents genres musicaux que l'on pouvait entendre, ils avaient fait de chouettes découvertes.

Les années passaient et bien que leur amitié avait subit des revers au lycée, cette fête sonore où la nuit était la plus courte de l'année demeurait et, même s'ils étaient fâchés pour des raisons diverses et variées, ils étaient bien forcés de s'y croiser. D'abord, chacun faisait mine de ne pas avoir vu le premier, facilement reconnaissable à l'œil au beurre noir que le second lui avait fait avant de se prendre en retour un uppercut qui lui avait laissé un bel hématome au bas du visage. Puis en ayant assez de s'ignorer, ils profitaient d'un bar ouvert pour s'asseoir à une table devant un soda ou un jus de fruit, faisant la paix tout en écoutant le groupe de jazz qui jouait à côté.

Après le lycée, ils se sont séparés pour que chacun suive sa route mais ça ne les avaient pas empêchés de se retrouver lors de cette première soirée d'été, près d'une scène où jouait un groupe de rock et tous deux accompagnés d'amis qu'ils s'étaient fait. Leurs deux bandes s'étaient mélangées, bien qu'ils étaient très différents sur bien des points et tous avaient passé un bon moment. Les deux amis étaient heureux de se retrouver, retrouvant vite leurs marques, cela sous le regard d'une des filles de leur groupe qui, face à leur complicité, eut un sourire plein de mystère et de malice aux lèvres avant de prendre une gorgée de sa bière ambrée, le tout sur une reprise d'une chanson des Beatles.

Enfin vint l'année précédente, riche en rebondissement divers et variés : l'un avait brutalement rompu avec sa petite amie et l'autre avait eu un différend avec son employeur. Tous deux s'étaient retrouvés pour repartir du bon pied, faisant cela en se mettant en colocation et reprenant ensemble ce rythme si particulier qui, sans le savoir, leur avait manqué. Cependant, aucun d'eux n'avait vraiment envisagé qu'un nouveau tempo allait s'installer progressivement et que durant cette première nuit d'été, sur le chemin du retour et au son lointain d'une voix suave chantant une chanson d'amour, ils échangeraient un regard d'une telle intensité. Quelque chose leur avait soudain semblé évident, comme si c'était sous leur nez depuis le début mais qu'ils avaient été trop aveugles pour s'en apercevoir plus tôt.

C'était resté dans leurs esprits quand ils montèrent l'escalier de leur immeuble, cela même quand ils entendirent que leur vieille voisine du deuxième étage devait encore être débout en train d'écouter un vieux vinyle d'Edith Piaf. Aucun d'eux n'avait sommeil quand ils entrèrent dans leur appartement et c'était tout naturellement que l'un d'eux avait pris son téléphone pour mettre une radio diffusant surtout des morceaux de musiques allant du rock au metal, faisant qu'ils tombèrent pile au début d'une chanson d'un groupe nommé Beast in Black, à laquelle ils n'auraient pas prêté plus d'attention que cela, la gardant en simple fond sonore, si les premières paroles avaient été différentes.

Aucun d'eux ne bougeait, chacun écoutant attentivement la musique et les mots prononcés par le chanteur. Lors du refrain, chacun plongea son regard dans celui de l'autre, cherchant une étincelle prouvant que ce qu'ils avaient réalisé plus tôt était réciproque, leurs oreilles restant attentives au morceau qui passait à la radio. Ils se rappelèrent leurs précédents souvenirs de la Fête de la Musique, commençant par leurs frasques d'enfance, leur rivalité adolescente, le moment où leurs routes s'étaient séparées pour finalement se rejoindre à nouveau... Lors du solo de guitare, ils s'étaient inconsciemment rapprochés l'un de l'autre et ce ne fut qu'à la reprise du refrain qu'ils franchirent la ligne qui allait à jamais changer le rythme de leur relation.

Un an après, la chaleur se ressentait à travers la ville ainsi que les multiples notes dont les rues étaient parsemées depuis la fin de l'après-midi où démarrait la Fête de la Musique. Assis sur le rebord de la fenêtre de leur appartement, il y avait Yuri qui cherchait un peu de fraicheur, simplement vêtu d'un large débardeur et d'un short noir s'arrêtant à mi-cuisses qui accentuait le côté androgyne de sa silhouette. Installé au comptoir qui leur servait de table pour prendre leurs repas, il y avait Flynn qui terminait de vérifier leurs comptes en banque, s'assurant que leur budget du mois avait été respecté et qu'ils avaient de quoi se permettre de remplacer le vieux sofa qu'on leur avait donné lors de leur emménagement et qui était assez peu confortable.

En entendant résonner une reprise de "Paint it Black" venant d'une rue proche de leur immeuble, Flynn finit par éteindre son ordinateur, estimant qu'il avait eu toutes les réponses qu'il souhaitait pour aujourd'hui, puis il tourna son regard azur vers celui qui était à la fois son ami d'enfance, son meilleur ami, son colocataire et son petit ami, lui permettait de le voir bouger son pied en rythme avec la musique, le tout en suçant un glaçon qui devait auparavant être dans le verre de thé glacé qu'il s'était servi plus tôt.

—Tu es d'accord pour sortir ce soir ? demanda-t-il, cela bien qu'il se doutait quelle serait la réponse.

—Ca dépend, lui répondit Yuri avant de donner un coup de langue au peu qu'il restait de son glaçon et de le remettre dans le verre vide à ses côtés. Seuls ou en groupe ?

—D'après ce que j'ai compris en discutant avec Sodia hier, il se peut qu'on la croise en ville accompagnée de Judith. C'est moi ou b-

—Nan. Elles trainent ensemble trois soirs par semaine depuis un mois et elles passent tantôt la nuit chez l'une, tantôt chez l'autre. J'verrais bien si Judy se décidera à arrêter de me répondre à coup de « peut-être » quand je lui demande si elle fait des galipettes avec Roxy ou si je dois justement enquiquiner Roxy jusqu'à ce qu'elle lâche le morceau et qu'elle me colle une baffe après.

Flynn préféra ignorer cette dernière remarque, surtout qu'il n'allait pas défendre sa moitié s'il mettait celle-ci à exécution car là, il cherchait les problèmes. Il s'installa donc face à lui, son regard azur profitant de la vue qui lui était offerte sur ce visage aux traits fins encadré par des mèches sombres s'échappant de ce chignon fait à la va-vite qui n'était maintenu en place que par une pince à cheveux… jusqu'à ce que son petit ami vienne poser son pied nu sur son épaule.

—Tu comptes rester dans cette tenue ? questionna-t-il, attirant sur lui un regard anthracite qui sous-entendait clairement que son cher ami ne voyait pas quel problème cela pouvait poser. Je vais finir par croire que toi et Judith êtes en train de faire un concours à celui qui portera le moins de tissu…

—Serais-tu jaloux que quelqu'un d'autre que toi puisse avoir le plaisir d'admirer ces gambettes ? répliqua Yuri avec sa malice habituelle, le tout en faisant glisser son pied sur le torse de son compagnon qui était caché sous une chemise claire à manches courtes.

—Je doute fort que d'autres les voient d'aussi près, surtout que tu sembles beaucoup aimer me les passer autour du cou ces derniers temps…

—Est-ce de ma faute si elles s'accordent à la perfection à ta gueule d'ange ? Elles mettent ton teint en valeur.

Il sourit à cette phrase, toujours amusé par leurs petites taquineries mutuelles qui duraient depuis des années. Quand il entendit la nouvelle musique jouée et finit par reconnaitre une reprise de « No one like you » de Scorpions, il combla la distance entre eux pour poser ses lèvres contre celles de sa moitié durant une seconde… qui fut plus longue que prévue quand l'intéressé ne le laissa pas rompre le contact si facilement, ayant passé sa main derrière sa tête pour l'empêcher de s'écarter, changeant un simple baiser en un échange plus fougueux et rythmé…


NB : Voilou… Je précise bien entendu que je ne ferais pas de suite, même si je suis tentée d'écrire du Judith x Sodia un jour.

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Kaleiya Hitsumei

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